Voici une présentation synthétique de la poétique de Ponge : Le Parti pris des choses tente de rendre compte des objets de la manière la plus précise et la plus rigoureuse possible, cherchant en particulier à exprimer leurs qualités caractéristiques. Ce compte-rendu porte sur les qualités physiques de l'objet (Ponge recourt volontiers au vocabulaire technique des sciences expérimentales ; signalant à plusieurs reprises sa dette envers Buffon ou de Emmanuel de Martonne5, il insiste sur la parenté entre son travail et la recherche scientifique), mais aussi sur les qualités linguistiques du mot désignant l'objet, en particulier l'étymologie, mais aussi le choix et l'ordre des lettres qui composent le mot. Ainsi Ponge écrit-il en ouverture du Cageot : « À mi-chemin de la cage au cachot la langue française a cageot ». L'ambition du poème consiste alors à établir des liens justifiant le rapprochement entre l'objet d'un côté et le mot de l'autre - ce que Ponge appelle « fonder (le mot) en réalité » : on a pu ainsi qualifier son travail de cratylisme[réf. souhaitée], par référence au Cratyle de Platon où Socrate tente d'établir des étymologies ainsi « fondées en réalité ». Il en découle que chaque objet commande sa propre rhétorique, et jusqu'à la forme même du "poème" destiné à rendre compte de ses qualités. Ponge résume cette recherche par une équation frappante : « En somme voici le point important : PARTI PRIS DES CHOSES égale COMPTE TENU DES MOTS. » 6. Le signifiant est alors exploité tant phoniquement que graphiquement (Ponge fréquente assidûment les peintres, notamment Braque, Picasso et Fautrier auxquels il consacre des essais). Ainsi le mot s'emploie-t-il comme matériau du texte (Ponge s'inscrit dans la lignée poétique de Rimbaud, Lautréamont et Mallarmé). Cependant, les jeux de lettres relèvent de l'arbitraire de la langue et de l'irrationnel (le rapprochement entre "cage", "cageot" et "cachot" peut encore se justifier, mais entre "savon" et "savoir", par exemple, l'analogie semble bien plus discutable). Ponge s'évertue, dans Le Parti pris des choses, à accroître cette part irrationnelle au moyen de calembours, d'allitérations, de permutations de lettres, d'analogies gratuites, d'associations d'idées audacieuses (à propos de l'orange, il évoque la « lanterne vénitienne des saveurs »), tout en restant, en apparence, sur une description "à froid". Cette tension extrême des textes diffuse un humour très subtil, lequel couvre d'apparences débonnaires ou futiles un message bien plus tragique et subversif : le "compte tenu des mots" s'avérant impérieux pour tout discours (pas seulement pour les textes du Parti pris), et la forme de ces mots relevant en partie de l'arbitraire linguistique, alors il existe nécessairement une part irrationnelle dans tout discours. Dans une telle perspective, truffer une description en apparence objective et rigoureuse d'éléments irrationnels ressemble, à bien des égards, à un travail de sape systématique de la langue. Commentant son propre travail, Ponge évoque un "anarchiste" en train de construire une "bombe" dont la "poudre" serait l'irrationnel (Entretiens avec Philippe Sollers). Par ailleurs, cette dimension irrationnelle inhérente à tout discours renvoie l'individu à l'absurdité de sa condition. Cependant, Ponge écrit contre le pessimisme existentiel, l’incertitude et l’angoisse métaphysique, le "silence déraisonné du monde" auquel Camus fait référence dans Le Mythe de Sisyphe (« L’absurde naît de cette confrontation entre l’être humain et le silence déraisonné du monde »7), ou encore Pascal (« Le silence éternel des espaces infinis m’effraie8 »). Ponge entend au contraire faire parler les choses : « le monde muet est notre seule patrie » déclare-il. Il choisit délibérément des objets finis, modestes, circonscrits, « rien qui flatte ce masochisme humain, rien de désespérant ». En 1954, dans Pratique d’écriture ou l’inachèvement perpétuel, publié en 1984 dans la collection l’esprit et la main, il déclare :
Il se réclame également de Lucrèce (ier siècle av. J.-C.), disciple d’Épicure, dont le De rerum natura rappelle le titre qu'il avait d'abord envisagé pour Le Parti pris des choses : « l’approbation de la nature »[réf. souhaitée]. Pour lui, « la foudre est physique et pas métaphysique ». L’univers se réduit à un ensemble d’atomes qui s’assemblent selon diverses combinaisons. Le matérialisme philosophique est donc ici à rapprocher d’un matérialisme verbal et poétique. Source : Wikipedia (je n'ai pas trouvé mieux). DONC : Comme vous devrez écrire un texte à la manière de Ponge, il faudra que votre texte : - tente de rendre compte des objets de la manière la plus précise et la plus rigoureuse possible, cherchant à exprimer toutes leurs qualités caractéristiques, comme dans une définition. - aborde l'objet de votre choix d'un point de vue technique, et utilise des mots techniques. - aborde les qualités linguistiques du mot désignant l'objet, en particulier l'étymologie et la phonétique, mais aussi l'aspect graphique du mot, le choix et l'ordre des lettres qui le composent. Il faudra se montrer "cratyliste", c'est-à-dire faire comme si le mot (sa forme, sa sonorité, son origine) trouve son origine dans la chose qu'il désigne. - emploie des procédés stylistiques qui vont dans ce sens : personnifications, jeux de sonorités (harmonies imitatives, passant par des assonances et des allitérations), mise en page particulière (comme ans "l'Huître", qui est composé de paragraphes de plus en plus courts, comme pour imiter, d'abord, la coquille, puis la chair, et enfin la perle), jeux de polysémie (jeux sur les sens variés d'un seul mot, comme "expression", dans "l'Orange" : expression d'une orange, qui consiste à exprimer, au sens propre, son jus, et "expression littéraire")... - flotte entre l'objectivité d'une définition et la subjectivité d'un poème. |