Pierre Billard écrit dans son livre Louis Malle. Le rebelle solitaire (Plon) : "le film se veut fidèle au livre, sur le plan de la mise en cause des formes, et aussi de la vision critique d'une société en perte d'identité et de sens des valeurs, plongée dans l'hypocrisie et le faux-semblant." I. Vous prendrez dans le roman et son adaptation filmique un exemple de "mise en cause des formes". II. Comment la société française est-elle d'une certaine manière mise en cause dans le roman et dans le film ? QUESTION 1 : Zazie dans le métro est un roman de Raymond Queneau qui causa fit fureur dans les années 60. Une année après sa publication, Louis Malle décide de transcrire cette œuvre au cinéma. Cela représente un grand défi pour le réalisateur qui est contraint de rester le plus fidèle possible a la vision de l’auteur. Nous pourrons porter un regard critique sur un point précis qui caractérise tant le livre que le film : il s’agit de l’adaptation des « mise en cause des formes ». Afin de mener notre étude nous ferons un parallèle entre le livre et le film, depuis l’ellipse narrative dans le roman à l’incohérence spatio-temporelle à l´’écran. D’emblée il est convenable de nous fixer sur un exemple précis qui illustre parfaitement notre problématique. Nous étudierons donc le chapitre V du livre qui est transposé au cinéma de la minute 25 :55 à la minute 33 :55 il s’agit de la séquence dans laquelle Zazie raconte à Pédro Surplus l’histoire de sa mère qui tua son père. Si nous comparons les deux nous pouvons nous rendre compte que Louis Malle a fait des choix, il essaye non pas de rester fidèle à ce que Queneau a écrit explicitement mais plutôt à l’intention de celui-ci. Le rythme du roman est suivi et transcrit par Malle à travers les accélérations du mouvement par exemple. En ce qui concerne ce passage précisément nous voyons que le réalisateur a coupé des dialogues mais en revanche il à a mis en avant la course entre Zazie et Pedro- surplus. Elle est nettement plus longue que dans le livre ; cela dit, il est fort probable que Malle ait voulue lui donner plus d’importance du fait que la scène dynamise l’histoire. Le rythme est sans cesse en accélération mais le jeu avec les pauses est remarquable du fait qu’il casse avec le mouvement agité antérieur. Par exemple la rupture produite quand Zazie commence son récit, il y a un retour en arrière marqué par l’image qui devient floue petit à petit, de même la musique cesse et la voix de Zazie est mise en avant. Le spectateur et surpris ainsi que Pedro-surplus quand elle tape des mains. Elle rompt le flash back et revient à l’instant présent, comme si elle venait de se réveiller d’un rêve. Par la suite nous remarquons que dans la scène du dîner, qui se situe au début de l’œuvre il y a plusieurs ellipses narratives. En effet Malle met en scène des personnages qui font des mouvements mécaniques. Ils mangent comme s’il s’agissait de robots. Lorsque nous lisons le livre cette sensation n’est pas si évidente. Zazie mange la soupe très vite, au point où elle ne rempli plus sa cuillère, ensuite l’oncle Gabriel mange les asperges en entier puis juste après il ne mange que la moitié et les laisse tomber. Nous devons tenir en compte qu’un des objectifs de Malle était la dénonciation d’une société de consommation. C’était donc pour lui une occasion de transmettre ce message. Nous trouvons de même des passages qui se mélangent, c'est-à-dire que Malle coupe des situations pour en insérer d’autres. Par exemple, au début de l’histoire le monologue de Charles est supprimé et substituer par la scène du taxi, dans le film. Un autre moment qui est frappant et même marrant dans le livre est la scène du « cacocalo » qui est aussi supprimée chez Malle. Il est bien sûr impossible pour Louis Malle de transposer exactement tout ce qui ce passe dans le roman, il fait omission des situations qui ne sont pas pertinentes pour la continuité de l’histoire. Il est obligé de laisser de côté des aspects qui n’ont pas vraiment d’intérêt. L’incohérence spatio-temporelle est perçut par exemple dans le dédoublement des personnages. Comme le fait Zazie dans la poursuite avec Pédro-surplus. Cet effet visuel témoigne du genre merveilleux et fantastique duquel le roman de Queneau est significatif. Par exemple lors de la scène du dîner que Zazie apparait à la fois d’un côté et de l’autre de Gabriel ou dans la poursuite de Trouscaillon et de Zazie. Nous pouvons dire que Louis Malle à rendu compte des principales intentions de Queneau mais il est contraint de faire des choix et donc de supprimer ou ajouter des scènes ou des plans qui peuvent rendre compte mais d’une manière différente ce que le livre essaye de transmettre. La transcription que fait Malle reste tout à fait fidèle au roman malgré quelques omissions ou changements de situations qui d’un autre côté anime l’histoire. Tu donnes certes des exemples, mais tu n’es pas assez explicite, vraiment pas assez, en terme d’analyse. Il manque à ta réponse des termes techniques qui te permettraient d’être plus précise, et de fournir une réponse plus riche. Par ailleurs, tu parles des intentions de l’auteur, que transpose Malle. Quelles sont précisément ces intentions ? Bref, je suis sûr que tu peux améliorer cette réponse. Tu peux t’aider du cours que j’ai préparé, le dernier, sur le temps dans Zazie. Regarde mon site. QUESTION 2 : Dans cette deuxième question nous nous interrogerons plutôt sur la représentation de la société française dans le roman et dans le film. Nous assistons à une époque de changements où la société devient de plus en plus artificielle et vie des apparences. Dans un premier temps nous étudierons une remise en cause par le langage pour ensuite étudier l’intrusion du mythique et de l’allégorique. Queneau traite dans son livre la question du langage. En effet son ambition était de renouveler la langue française. Dans son roman les mots sont écrits tel qu’ils sont utilisés dans le langage oral. De plus le vocabulaire employé dans le roman n’est pas courant dans le domaine littéraire, c'est-à-dire qu’il casse avec le langage classique, soutenu auquel est habitué le grand public de l’époque. En outre le personnage de Zazie utilise des mots qui ne sont pas propres à une petite fille de son âge, comme par exemple « mon cul » ou « pour faire chier les mômes ». Elle-même est une « môme » ! Ses préoccupations sur le monde des adultes l’emmènent à se poser des questions qui ne sont pas habituelles chez une « mouflette ». Elle insiste beaucoup sur le thème de l’homosexualité même si dans le film de Malle cet aspect est plutôt mis de côté. C’est aussi au moment de la tour Eiffel que Zazie met mal à laise Charles. L’adulte ce sent en quelque sorte agresser par la fillette qui le questionne sur le mariage et les relations amoureuses. Elle pose souvent des questions au sujet des relations adultes. D’un autre côté Zazie met à nu les artifices de leur langage. Turandot ne veut pas d’une « gamine » qui parle comme elle le fait, il est scandalisé, pourtant c’est le langage courant, de la rue que tout le monde utilise en France: « je veux pas dans ma maison d’une petite salope qui dise des cochoncetés comme ça […] elle va pervertir tout le quartier ». En faisant cette interjection lui-même utilise le langage qu’il condamne, il se contredit. Zazie est petite mais elle est une menace pour certains adultes qui ne veulent pas se dévoiler tel qu’ils sont, c’est elle qui le fait de manière astucieuse par le biais de questions incongrues qui ouvrent les yeux des adultes. Elle toute seule dévoile le monde que nous voulons cacher par les apparences, la bienséance etc… elle réussi à enlever le voile qui cache cette réalité que tout le monde connaît. Par la suite nous pouvons remarquer, surtout chez Louis Malle des éléments qui mettent en évidence la critique de la société française de cette époque. Queneau et Malle ont recours au mythique et a l’allégorique pour signifier cela. Dans le film, certains éléments révèlent l’aspect « bidon » d’une société hypocrite. Cette idée est illustrée par exemple au changement constant de décor du bistrot de Turandot. Les « bloudjinnes » sont aussi une marque du modèle américain, qui s’affirme et influence la mode de cette époque. Les apparences sont incarnées par le personnage de Trouscaillon, Pédro-surplus. Il est comme un caméléon, il joue clairement sur les apparences et sa véritable identité reste, finalement inconnue. Ce personnage aux multiples facettes renvoi une image de la superficialité de la nouvelle société, qui a perdue toute identité comme lui (il ne sait pas quel est son prénom ni son âge).D’une autre part Gabriel à du mal á s’accepter et nie totalement son penchant sexuel. Pourtant son travail le révèle très bien et à la fin, quand l’auteur dévoile que Marceline est un homme il n’y a plus aucun doute. Très bien, tout cela. La monstruosité de la modernité urbaine est mise en avant dans le film. Par exemple dans la scène du taxi, tout le monde se tape dessus pour pouvoir y accéder. Nous avons l’impression d’être dans une jungle ou règne la loi du plus fort. C’est en cela que Malle fait une critique assez forte : les gens essayent de maintenir des apparences mais ici ils se battent littéralement pour prendre le taxi, ils sont totalement hors contrôle. Il est paradoxal qu’une société si organisée et si correcte oublie l’existence de la politesse. Le public se voit reflété comme dans un miroir. La société est égoïste, personne n’est prêt à céder sa place à un autre et tout le monde visera son propre intérêt coûte que coûte. Un autre moment du film qui signifie cette foule chaotique est quand Zazie se laisse mener par les passants. Nous assistons à une scène où les parisiens sont très nombreux mais aucun fait attention à la petite. Ils ne se préoccupent pas de ce qui les entoure. De plus ils encombrent le plan en donnant une sensation de claustrophobie telle, qu’il est difficile de regarder le film sans se sentir mal à l’aise.
Pour conclure nous pouvons dire que Malle décide de transposer la critique de la littérature faite par Queneau en critique de la société moderne et des procédés cinématographique. Malle cherche aussi à mettre en évidence la brutalité et le changement que la société à fait. Les gens pensent que pour eux, la société est devenue plus individualiste et égoïste. En fin de compte le réalisateur laisse voir un aspect primitif qui échappe aux apparences.
Une bonne réponse malgré les négligences orthographiques qu’il faudra corriger. Sois plus claire et précise quand tu parles de mythologique et d’allégorique : je te suggère de bien consulter les pages 112 et 113 du livre vert, évoquant le « personnage » de l’embouteillage ! |
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